La fabrication du saké

La fabrication traditionnelle du saké suit trois grandes phases successives.

La préparation du riz.

Le riz doit être soigneusement préparé pour pouvoir être fermenté par la suite, et notamment pour pouvoir y cultiver le koji, champignon microscopique qui transformera les sucres complexes en sucres simples indispensables pour une bonne fermentation. 

Cette préparation se déroule en trois phases : le polissage, le nettoyage et le trempage, et pour finir la cuisson.

LE POLISSAGE DU RIZ

Dès son arrivée à la brasserie, le riz est passé dans des machines qui vont le polir par friction. Ce polissage est très important pour la fabrication du saké dont la qualité et la finesse dépendent du degré de polissage des grains.

L’opération de polissage consiste à raboter l’enveloppe extérieure du grain de riz pour atteindre le cœur riche en amidon élément indispensable à la saccharification. Les composants présents dans l’enveloppe tels que les lipides, vitamines, et protéines vont modifier le profil aromatique du saké amenant de l’amertume. Le saké réalisé avec du riz non poli possède un goût relativement fort, lourd et profond. En revanche, un saké brassé avec du riz soigneusement poli possède des arômes subtils, un goût frais et léger.

C’est pourquoi la classification principale des sakés se fait selon le critère du taux de polissage du riz.

Cette technique requiert un savoir-faire spécifique et rigoureux. Le riz doit être poli en prenant soin de ne pas l'abîmer ce qui pourrait tout simplement compromettre la production du saké. C’est pourquoi la vitesse des machines à polir diminue au fur et à mesure du processus qui peut prendre jusqu’à 50 heures pour les sakés les plus raffinés.

Le taux de polissage généralement utilisé dans le monde du saké est le ratio entre le poids du grain avant et après polissage. Il s’agit donc d’un taux résiduel qui indique le pourcentage de poids restant, par exemple un taux de polissage de 60% signifie que 40% de la masse du grain originel a été abrasée.

Le degré de polissage varie selon le type de saké produit, il peut aller jusqu'à moins de 50% pour le saké haut-de-gamme, il ne reste alors que le cœur amidonné du grain débarrassé de son enveloppe. 

La farine de riz, produite lors du polissage du riz a plusieurs utilisations ; la farine brune est utilisée pour l’alimentation animale, tandis que la farine blanche sera destinée à la production de cosmétiques, biscuits et desserts japonais.

LE NETTOYAGE ET LE TREMPAGE DU RIZ

Une fois le riz poli, une fine couche de poudre blanche appelé nuka, recouvre les grains. Il faut alors les nettoyer, pour cela on les trempe dans de l'eau de source. Le but du trempage est également de faire absorber une quantité d’eau précise pour permettre une bonne cuisson.

Cette étape peut paraître anodine, pourtant il faut porter une attention particulière à la durée du trempage. En effet, plus le grain a été poli, plus il absorbe l'eau rapidement. Son taux d'humidité doit être rigoureusement contrôlé et la durée du trempage peut aller d’une minute à quelques heures. Afin d’éviter tous problème les ouvriers chronomètrent à la minute près le processus de trempage.

LA CUISSON DU RIZ

Une fois le riz humidifié, il est maintenant prêt à être cuit dans le but de le préparer pour les étapes de saccharification avec le koji et de fermentation avec les levures. 

La cuisson s'effectue à la vapeur dans des grands cuiseurs appelés koshiki, et ne dure généralement pas plus d'une heure. Comme lors de l’opération de trempage, le plus grand soin est apporté à la cuisson du riz, température et pression de l’étuve sont constamment ajustées pour obtenir la combinaison idéale entre dur et tendre qui sera déterminante pour la suite du processus de sakéification.

A la fin de cette étape, le grain de riz doit être tendre à l'intérieur et dure à l'extérieur, ce qui permet de déterminer si le riz est prêt à être fermenté ou ensemencé de koji.

Une partie du riz va alors être transférée vers la salle du koji pour y être préparée, tandis que l'autre partie ira directement en cuve pour démarrer la fermentation à l'aide de levures et d'eau.

La fermentation.

La fermentation est la phase de transformation des sucres simples en alcool sous l'action des levures. Pour cela il faut préparer le riz en transformant les sucres complexes comme l'amidon qu'il contient à l'aide d’un moût d’amorçage appelé shubo qui signifie littéralement « mère du saké », ensemencé par du koji un champignon microscopique.

Une fois ensemencé le riz koji kome sera alors mis dans des cuves de fermentation dans lesquelles sera ajouté le reste du riz, de l'eau et des levures, pour être fermenté pendant plusieurs jours

PREPARATION DU SHUBO, OU MOUT D’AMORÇAGE

Le maître brasseur doit préparer un moût d'amorçage qui servira à enclencher la fermentation dans les meilleures conditions. Pour cela il mélange du koji avec de l'eau, du riz et des levures dans une petite cuve prévue à cet effet et laisse fermenter durant deux semaines jusqu'à l'obtention d'un moût hyper concentré en levures.

Une partie du riz (à peu près 20%) appelée koji mai, est alors ensemencé de spores dans une salle spécifiquement prévue à cet effet et dont le taux d'humidité et la température sont rigoureusement contrôlés. Cette opération est le cœur du processus de sakéification, sans elle la fermentation ne pourrait pas avoir lieu.

Le koji-kin est un organisme vivant classé entre le champignon microscopique et une moisissure. Il se présente sous la forme d'une fine poudre noire qui sera dispersée sur le riz étalé en couche sur de grandes tables. Il entre alors en action et se développe dans le riz. La culture contrôlée à chaque instant, s'achève au bout de 36 à 48 heures.

A la fin de la préparation, les grains sont recouverts d'un fin duvet formé par les champignons et le riz koji kome ensemencé est alors prêt à passer à l'étape suivante.

FERMENTATION DU MOUT PRINCIPAL OU MOROMI

Le moût principal, appelé moromi en japonais, nécessite cinq ingrédients ; du riz cuit, du koji, de l'eau, des levures et le moût d'amorçage.  Après avoir été versé dans des grandes cuves, le mélange va bénéficier d'un traitement particulier sur une période de quatre jours. Par trois fois, plus de riz, de koji, d'eau et de levures seront ajoutés successivement, doublant le volume du moût à chaque ajout.

Lorsque le volume de moût désiré est atteint, soit environ 2,5 tonnes de riz et 4 tonnes d’eau, la fermentation principale peut véritablement commencer. En grande cuve, le koji continue à transformer l’amidon en sucres, qui à leur tour sont convertis sous l’action des levures en alcool et en esters à l’origine des arômes du saké.

Le moromi va fermenter pendant 18 à 32 jours durant lesquels sa température et d'autres paramètres seront mesurés et ajustés afin d'obtenir le profil aromatique recherché.

La préparation à la mise en bouteille.

A la fin de la fermentation le saké est presque prêt, il ne lui reste plus que quelques étapes à franchir ; le pressage, le filtrage, la pasteurisation et la maturation.

L’AJOUT D’ALCOOL DISTILLE

Pour certains sakés (à l’exception des junmai) de l’alcool distillé de maïs ou du shochu est ajouté en petite quantité en conservateur et exhausteur de goût.

LE PRESSAGE OU JOSO

Une fois la fermentation achevée, le tout nouvel alcool crée doit être débarrassé des résidus solides laissés par le riz. Pour cela on verse le moromi dans une machine appelée yabuta qui pressera la lie de saké ou kasu, jusqu'à l'obtention d'un liquide claire : le jeune saké.

LE FILTRAGE

Après avoir reposé pendant quelques jours afin de laisser retomber les derniers résidus en suspension, la plupart des sakés sont micro-filtrés à travers une couche de charbon ou par centrifugation afin d'ajuster le profil aromatique et la couleur en purifiant le saké.

LA PASTEURISATION

Afin de mieux se conserver, certains sakés sont pasteurisés pour éliminer les derniers germes, bactéries ou levures qui n'auraient pas été supprimés lors de la filtration et pour stopper l’action des levures.

Il existe deux étapes de pasteurisation : en cuve et en bouteille. La première en cuve a pour effet de tuer instantanément tous les micro-organismes et ainsi stopper leur action.

La deuxième pasteurisation qui permet une conservation plus longue, n’est pas pratiquée pour tous les sakés. Elle s’effectue lorsque le saké est embouteillé, les bouteilles sont plongées dans de l’eau à 65°c pendant dix minutes. Les sakés n’ayant pas subi la deuxième pasteurisation entrent dans la catégorie des nama.

LA MATURATION

Pour finir, une majorité de saké sont mis au repos en cuve pour une période allant de trois à six mois afin de laisser le saké s'équilibrer et s'arrondir avant la commercialisation.

Titrant dans les 20 % du volume, le saké est très légèrement dilué avec de l'eau de source afin d'abaisser le niveau d'alcool entre 14 et 17 %.